À quoi servent les écosystèmes ?

Cette question est vraiment fondamentale et une réflexion assez poussée est nécessaire pour justifier… une majorité des autres publications de ce site, pourtant nombreuses. Voici par exemple la définition d’écosystème proposée par Wikipedia.

En écologie, un écosystème est un ensemble formé par une communauté d’êtres vivants en interrelation (biocénose) avec son environnement (biotope). Les composants de l’écosystème développent un dense réseau de dépendances, d’échanges d’énergie, d’information et de matière permettant le maintien et le développement de la vie.

Effectivement, les écosystèmes sont les mécanismes qui permettent à la vie de se maintenir et se développer. Nous, humains, sommes donc dépendants des écosystèmes comme tous les êtres vivants autres que certains unicellulaires. Nous allons étudier ici des bases de ce fonctionnement pour mieux comprendre l’impact de nos activités : comment celles-ci empêchent souvent les écosystèmes de faire leur travail ou, au contraire, comment nous pouvons produire notre nourriture en aidant les écosystèmes, approche que nous recommandons dans l’article “permaculture végane

corail_ecosysteme_1Nous allons baser nos explications sur l’exemple des écosystèmes terrestres types et non pas des écosystèmes marins. Néanmoins, les mêmes principes s’y retrouvent également.

Tous les êtres vivants sont composés de molécules contenant du carbone. Le cycle du carbone est une des bases principales de l’écosystème, sans doute la plus importante. Ce cycle sera notre fil conducteur pour expliquer les concepts dont nous avons besoin pour approfondir des sujets cruciaux, notamment dans deux articles différents : le rôle des espèces dans l’écosystème et les pollutions. Nous invitons le lecteur qui n’est pas familier avec la photosynthèse, le cycle du carbone et les autres mécanismes des écosystèmes, à consulter ce diaporama gratuit et libre de droit d’où est issue l’image ci-dessous, très explicite. On y parle aussi du cycle de l’azote qui est également d’une importance capitale.

Énergie solaire et quantité de matière vivantecycle_carbone1.jpg

Grâce au schéma ci-contre, on se rappelle que tous les êtres vivants consomment du carbone et en rejettent. Rappelons que toutes les protéines, les lipides et glucides sont des molécules carbonées. Les animaux mangent de la matière vivante, à base de carbone, et rejettent finalement, lorsqu’ils respirent, tout ce carbone sous forme de dioxide de carbone (CO2) directement ou indirectement. En effet, le carbone qui n’est pas expiré est rejeté mort (déjection, cornes, sabots, poils, becs, ongles et finalement le cadavre) mais sera consommé par d’autres animaux ou organismes qui, eux, respirent aussi. Lorsqu’un animal se reproduit, en particulier la femelle, le carbone passera de l’adulte à la progéniture sous forme vivante, mais le cycle continuera : les jeunes expireront du carbone sous forme de CO2, et produiront des déchets morts comme leurs parents.

Les déchets finissent tôt ou tard chez les décomposeurs, comme les lombrics, les acariens et certaines bactéries. Ceux-ci décomposent la matière organique (carbonée) en matière minérale dont les plantes ont besoin (les fertilisants sont des matières minérales) et rejettent, encore et toujours, le carbone sous forme de CO2 dans l’atmosphère.

Ce rejet de CO2 n’est pas juste du gaspillage, c’est une nécessité vitale. Les animaux étant incapables d’utiliser directement l’énergie solaire, ils respirent de l’oxygène qu’ils associent au carbone pour dégager de l’énergie ; sans cette énergie, pas de vie animale (donc pas d’humain !). Le souci, c’est qu’il faut faire l’opération inverse, sinon tout l’oxygène serait consommé et remplacé par le CO2, rendant l’atmosphère irrespirable.  Bien sûr, puisque créer les molécules de CO2 à partir de l’oxygène et du carbone dégage de l’énergie, séparer l’oxygène du carbone consomme de l’énergie. Seules les plantes vertes peuvent faire cela : grâce à leur chlorophylle, elles captent le CO2 de l’atmosphère, récupèrent le carbone pour construire leurs branches, tiges, feuilles, fleurs, etc., et rejettent le précieux oxygène duquel les animaux sont totalement dépendants.

arusha_ecosysteme1L’énergie qu’utilise les plantes pour faire cette transformation appelée photosynthèse est l’énergie solaire. L’ensoleillement est d’ailleurs le principal facteur limitant de la “quantité de vie” : il y a plus de vie sous les tropiques que dans les régions tempérées ou froides car le soleil y donne plus d’énergie. Il y a plus de vie l’été que l’hiver dans les régions tempérées car il y a plus d’ensoleillement l’été que l’hiver.

Cela nous amène à la notion de biomasse. La “quantité de vivant” ne se chiffre pas en nombre d’individus, en biodiversité mais bien en masse totale. Quand nous disons qu’il y a plus de vie sous les tropiques, c’est que la biomasse moyenne est (largement) plus élevée sous les tropiques que dans les régions nordiques. Notons qu’il existe un autre facteur limitant : c’est la disponibilité de l’eau (douce puisque nous parlons d’écosystèmes terrestres).

Il est difficile de donner des chiffres ici concernant la biomasse moyenne des forêts tempérées, tropicales, boréales, mais une étude détaillée publiée en français (en pdf) peut intéresser le lecteur passionné.

Vers où se dirigent les écosystèmes ?

monduli_tanzanie_eco1L’humain a pris conscience de l’importance de la nature, mais souvent d’une manière tronquée. Ainsi, beaucoup de gens admettent l’idée de “protéger la biodiversité”. Toutefois, la biodiversité n’est ni un bon indicateur de l’état de la nature (donc des écosystèmes), ni l’objectif (ou la priorité) de la nature.

Soyons clairs et précis : nul n’a jamais répondu de façon scientifique et formelle aux questions sur l’utilité, les objectifs et les raisons de l’existence de la vie. Ces questions philosophiques sont intéressantes et, éventuellement, nous les aborderons plus tard. Ici, de manière totalement intellectuelle et scientifique, nous constatons que la nature ne “cherche” pas la biodiversité. La nature tend à produire le maximum de biomasse. Encore une fois, nous ne savons pas pourquoi, mais c’est un fait.

La biodiversité est l’ensemble des “outils” qu’ont à disposition les écosystèmes pour optimiser leur efficacité… l’efficacité à produire un maximum de biomasse. C’est un point extrêmement important. En effet, lorsque l’humain “gère” un site semi-naturel pour la biodiversité, il est constamment en conflit avec la nature qui a d’autres objectifs. Cela mène à beaucoup de paradoxes – dont le fait que beaucoup de naturalistes, au lieu d’aider la nature, participent à sa destruction.

Le climax

Selon Wikipedia, dans le domaine qui nous intéresse, le climax désigne l’état final d’une succession écologique et l’état le plus stable dans les conditions existantes de terrain et climat.

climax1.jpg

Tout écosystème qui n’est pas au stade du climax évolue assez rapidement (souvent en centaines d’années) vers le climax comme l’illustre le dessin ci-dessus et l’excellente page détaillé qui donne de multiples exemples d’où le dessin est extrait. Cette page, que nous vous invitons à lire attentivement, illustre et rappelle avec justesse que certains climax ont également leurs cycles. Ajoutons que la stabilité n’est que théorique. Bien que souvent de façon très lente, le climax est lui aussi en évolution.

Équilibre entre la biomasse, le CO2 et les déchets organiques

Le carbone existe toujours : “Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme” dit l’adage !
Où le carbone est-il alors caché lorsqu’il ne compose pas un être vivant ? On l’a vu plus haut : il peut bien sûr composer la matière organique “morte” (feuilles mortes, déjections, cadavres, etc.), mais il devient le dioxyde de carbone (le fameux CO2 de l’atmosphère) lorsqu’il a fini son cycle dans l’écosystème.

On a donc, constamment, un équilibre (type “vases communicants”) entre la vie (animaux + plantes + champignons etc.), la matière organique (“morte”) et le CO2. Lorsqu’il y a moins de vie, il y a plus de CO2. Naturellement et sans les pollutions humaines, il y a donc plus de CO2 dans l’atmosphère l’hiver que l’été dans les régions tempérées.

La biomasse est la masse totale de tous les êtres vivants et la matière organique d’un écosystème. Celle-ci est donc plus élevée lorsque l’écosystème capte plus de carbone de l’atmosphère. Un écosystème efficace est donc nécessairement composé de beaucoup de plantes vertes : les feuilles qui contiennent la chlorophylle captent le CO2 et produisent de la matière organique. Que la feuille soit mangée par un animal, qu’elle tombe et soit décomposée par un invertébré, que le carbone soit utilisé pour faire les branches ou les troncs n’y change rien : 100% du carbone est venu de l’atmosphère et a été capté, transformé par la photosynthèse.

Comprendre ceci est crucial mais devrait alors ouvrir des questions importantes qui pourraient sembler des paradoxes mais n’en sont pas.

  • Plus de CO2 dans l’atmosphère permettrait de faire des écosystèmes encore plus riches, ce n’est alors plus une pollution ?
    • Exact, mais dans certaines limites. Pour visualiser de façon simpliste, si on a plus d’eau dans le désert, on peut avoir plus de population, mais si on met trop d’eau, tout le monde sera noyé et il n’y aura plus personne…
  • Si les animaux mangent les feuilles, n’appauvrissent-ils pas les écosystèmes ?
    • Non, au contraire. En mangeant les feuilles, ils stimulent la plante ou l’arbre pour en faire repousser et donc capter plus de carbone de l’atmosphère. Imaginez un arbre tropical persistant (les feuilles ne tombent pas) qui ne serait jamais mangé. Pourquoi produirait-il encore de la matière organique une fois la taille adulte atteinte ? C’est donc parce que les chenilles, les singes, les oiseaux et les antilopes mangent leurs feuilles qu’ils continuent leur travail…
  • Les déjections animales sont de la nourriture pour les décomposeurs et fertilisent le sol. Pourquoi alors estimer que les élevages sont sources de pollution ?
    • Il y a deux raisons, la première est la quantité : voir plus haut l’exemple de l’eau dans le désert. Le second est le lieu où finissent ces déjections. Le problème est que les déjections (y compris humaines) font partie du cycle des écosystèmes terrestres. Quand ils finissent dans l’eau, ils constituent une pollution.

Nous approfondissons ces problèmes de pollution dans notre article : “Qu’est-ce qu’une “pollution” ?

Habitats de transition et biodiversité

Pour arriver à un climax comme une forêt, le sol doit être riche. Or, sans écosystème, le sol est généralement très pauvre. Pour nourrir les arbres de la forêt, il faut des décomposeurs, et ceux-ci ont besoin de matière organique à décomposer. La matière organique, nous venons de le voir, vient des plantes, des arbres… on a donc un “serpent qui se mord la queue” : la forêt à besoin de la forêt pour exister.

marais_australie1.JPGComment un sol nu et pauvre peut-il un jour accueillir une forêt ? Nous avons brièvement vu plus haut (avec un lien pour vous informer plus en détail) que le climax n’arrive qu’après une succession d’autres milieux. En effet, si une forêt ne peut pas pousser soudainement sur un sol nu et pauvre, des graminées ou d’autres petites plantes, elles, le peuvent. Elles vont nourrir des animaux qui vont produire des fertilisants via leurs déjections, leurs déchets et leurs corps qui permettront au sol de s’enrichir et faire pousser des plantes plus grandes, des buissons, des arbustes et, finalement, des arbres.

Une fois les arbres présents, ils vont capter la lumière nécessaire à la photosynthèse et donc, au niveau du sol, les graminées vont disparaître, faute de lumière. Les sols forestiers sont souvent nus.

La prairie (naturelle) est donc souvent un habitat de transition et pas un climax (il existe néanmoins des régions, par exemple trop froides ou trop sèches pour les arbres, où la prairie est un climax). Il en est de même pour les marais, les roselières et d’autres milieux qu’affectionnent les naturalistes mais qui disparaîtraient naturellement sans gestion.

Il existe des animaux spécialisés qui mangent les graminées, pollinisent les graminées, vivent dans les prairies et pas dans les forêts. Toute cette biodiversité disparaîtra lorsque la forêt se sera installée, et la biodiversité de la forêt n’est pas nécessairement plus élevée que celle de la prairie ou des autres habitats de transition. Nous l’avons vu plus haut : le climax a comme caractéristique de produire plus de biomasse que les autres habitats, mais pas nécessairement plus de biodiversité. Au contraire, celle-ci est souvent faible.

Ces différentes espèces spécialisées permettent aux habitats de transition un maximum “d’efficacité”, c’est-à-dire produire le plus possible de biomasse et… évoluer au plus vite vers le climax. La biodiversité est donc bien un outil nécessaire aux écosystèmes, mais pas l’objectif en soi.

C’est ainsi que toute “gestion” de la nature va toujours défavoriser la biomasse au profit du CO2 (renforçant ainsi le réchauffement climatique), et que les réserves naturelles gérées semblent constituer un grand paradoxe de la “conservation” de la nature. Cet article étant déjà très long, nous approfondirons ce sujet dans un autre article, dont le sujet sera donc la “gestion” de la nature, justement.

Conclusion

Les écosystèmes permettent à la vie, dont la nôtre, d’exister. Sous prétexte de rentabilité, de productivité, de sauvegarder la biodiversité, de loisir ou autre, l’humain qui ne comprend pas toujours bien les fonctionnements de ces écosystèmes et encore moins ses objectifs, les empêchent de plus en plus de fonctionner efficacement. Les conséquences sont si dramatiques que certains scientifiques estiment que la vie sur terre est en danger, notamment notre espèce, pour ces raisons. Cet article a pour but d’expliquer ou rappeler les bases les plus fondamentales nécessaires pour comprendre pourquoi telle ou telle activité est destructrice, et quelles activités sont, au contraire, positives. Il sera donc cité dans beaucoup d’autres publications comme préalable pour comprendre en détail l’analyse proposée, par exemple de la permaculture végane, du rôle des espèces dans les écosystèmes et d’autres à venir.

ouganda_ecosysteme_1.JPG

Vous pouvez commenter et poser vos questions ci-dessous ou nous rejoindre sur le groupe Econaturalistes.

Valéry Schollaert

Plusieurs articles sur ce blog vous permettent de comprendre la vision holistique de la conservation de la nature que nous tentons de communiquer à tous. Voici LA PAGE D’INTRODUCTION À LA VISION HOLISTIQUE où vous trouverez aussi les liens vers les autres articles.

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