Comment les amis des animaux tuent des animaux avec le même argument que les naturalistes détruisent la biodiversité !
Depuis la publication de cet article, nous avons approfondi le sujet dans deux vidéos que voici.
Nombreux sont les humains qui mettent en avant la liberté de penser et de choisir de chaque individu. On ne peut pas obliger les uns à aimer les animaux, les autres à se battre pour les écosystèmes et chacun fait ses choix avec ses arguments et ses compromis. Toutefois, il y a un fait que tous devraient admettre : si on veut agir pour une raison particulière, pour une cause, on ne peut arriver à un résultat positif qu’en étant cohérent… et là, le bât blesse.
Commençons par un constat : il y a de plus en plus d’animalistes (végans, amis des animaux, etc.) et de plus en plus de naturalistes / écologistes (pas au sens politique politicienne – on parle des “amis de la nature”) mais aucun des camps ne parvient à ses fins ! On tue de plus en plus d’animaux dans le monde, et la nature se porte de plus en plus mal.
Les deux sujets sont intimement liés de diverses manières. Le point principal est l’élevage : la production carnée est la première activité humaine destructrice d’habitats naturels dans le monde, et c’est aussi, bien évidemment, l’élevage qui tue le plus grand nombre d’animaux (avec la pêche, une “production carnée” aussi). On s’attendrait à une lutte en commun, les naturalistes et animalistes, tous végans, demanderaient d’une seule voix la fin des élevages et des abattoirs. En travaillant main dans la main, ces deux camps pourraient obtenir des résultats, mais en étant en perpétuel conflit, ils annihilent les effets, déjà limités, des uns et des autres.
Le chat : l’exemple parfait du malentendu profond entre animalistes et naturalistes
Pour simplifier, nous utilisons dans cet article le mot “chat” tout court lorsque nous parlons du chat domestique ou d’origine domestique appelé haret ou féral. Nous excluons donc explicitement les chats sauvages ainsi que tous les prédateurs sauvages quand nous écrivons “chats” (sauf précision contraire).
Lorsqu’on parle des chats et des animaux domestiques ou d’élevage, les deux camps font parfois preuve d’une mauvaise foi impressionnante, ayant un comportement incohérent qui est à la base de la non efficacité des actions des uns et des autres.
INCOHÉRENCE DES NATURALISTES
Les naturalistes, dans le monde entier, alertent sur le danger d’introduire des animaux non-natifs et n’hésitent pas à “éradiquer” (tuer, massacrer) des milliers d’individus, voire des millions, sous prétexte de sauver des espèces en danger (voir exemple de l’Ibis sacré – illustré ci-contre). Le chat est certainement l’animal introduit par l’homme dans la nature qui a éteint le plus d’espèces, en particulier sur des îles océaniques, et il est souvent considéré comme l’ennemi numéro un des personnes travaillant dans la conservation de la biodiversité. De façon générale, les animaux que l’homme élève, qu’ils vivent en élevage ou dans la nature, sont de très loin la première source de l’extinction de masse qui a lieu en ce moment. Toutefois, l’élevage de vaches, poulets, moutons, cochons, dindes et autres espèces destinées à la consommation humaine, vu leur nombre très supérieur (de l’ordre de 100-150 milliards contre maximum 1 milliard pour les chats), sont source de bien plus d’extinctions que le petit félin. Pour comprendre comment ces élevages détruisent les habitats naturels, lisez notre article sur le sujet.
Or, la plupart des naturalistes refusent de s’occuper de ces problèmes, souvent pour la simple et égoïste raison que cela impliquerait, chez eux, un changement de régime alimentaire. Cette incohérence a de lourdes conséquences: elle ralentit l’évolution nécessaire du grand public vers le véganisme, décrédibilise les actions de conservation de la nature, et empêche toute collaboration avec les animalistes pour qui le véganisme est devenu le strict minimum. Il semble en effet difficile de prétendre respecter les animaux lorsqu’une victime innocente sauvagement assassinée après une vie d’esclave gît dans notre assiette…
INCOHÉRENCE DES ANIMALISTES / VÉGANS
Les amis des animaux travaillent donc rarement avec les naturalistes, pourtant supposés aider les animaux en sauvant leurs habitats naturels et en les protégeant des activités humaines destructrices, pour les incohérences expliquées ci-dessus. Malheureusement, nombre d’incohérences sont à déplorer aussi chez les animalistes. L’exemple type concerne les chats, mais il y en a plein d’autres! Par exemple, les végans estiment que manger un pigeon tué par un chasseur est un crime inacceptable et ne feront jamais d’exceptions. Cependant, une majorité d’entre eux acceptent de manger un burger de soya non-bio, donc en pratique pulvérisé de pesticides divers qui tuent des milliers de pigeons et bien d’autres animaux.
Remarque importante : quand cet article a été publié en mars 2018, plusieurs végans m’ont reproché de les accuser erronément d’acheter de la viande pour leurs animaux. Ils m’ont dit : “ceux qui le font ne sont pas des végans”. Certes, donc en septembre 2018 j’ai changé la formulation ci-dessous en ajoutant “prétendus végans” pour qualitifier ceux qui se réclament du mouvement végan mais continuent d’acheter de la viande.
Ces prétendus végans vont manifester pour la fermeture des abattoirs, mais achètent de la viande de ces mêmes abattoirs pour leurs chats (et chiens). Manifestent-ils pour se donner bonne conscience, sachant qu’ils n’obtiendront en aucun cas gain de cause? Sinon, comment nourriront-ils leurs chats s’il n’y a plus d’abattoirs?
Un prétendu végan qui trouve un poulet perdu et un chat abandonné va probablement adopter les deux. Va-t-il tuer le poulet pour nourrir le chat? Si oui, comment se prétend-il végan en tuant un animal en détresse ? Si non, en quoi acheter du poulet (de batterie, d’élevage) en boite est-il plus respectueux des poulets que de tuer le poulet adopté ?
Une autre incohérence animaliste classique liée aux chats est le fait que ces derniers chassent dans la nature.
Les végans demandent, en général, le même respect pour les vaches, les poulets et les cochons que pour les chats et chiens, étant explicitement contre la discrimination.
Alors, comment expliquer que chaque chat domestique chasse et tue souvent des dizaines, voire plus de 100 ou 200 petits animaux sauvages annuellement, y compris des espèces protégées, sans que la majorité des prétendus végans s’en émeuvent et prennent des mesures ? Pire, certains affirment que les chats sont “utiles” car ils nous “débarrassent” des rongeurs “nuisibles”. C’est ainsi qu’on respecte les animaux sans discrimination, en les estimant nuisibles?
En résumé, concernant les individus s’affichant animalistes ou végans et les chats… alors que ces amis des animaux refusent l’idée de la discrimination, de l’exploitation des animaux et de la mise à mort de victimes innocentes, ils soutiennent l’exploitation animale en achetant de la viande pour chat et acceptent la mise à mort de victimes innocentes par leur(s) compagnon(s). Comment arrivent-ils à justifier une telle incohérence?
LA MÊME JUSTIFICATION BIDON : C’EST LA NATURE
Les naturalistes justifient leur consommation de produits carnés en affirmant que c’est la nature de l’homme, omnivore, que d’en manger. Cet argument est absolument non recevable mais ce sujet étant complexe, nous avons consacré un article complet pour démêler le vrai du faux. Voyons ici plutôt l’argument “c’est naturel”.
Depuis quand l’homme moderne fait-il ses choix sur base de la nature ? Internet, naturel ? Le smartphone, la tablette ? La nourriture cuite, le micro-onde ? La voiture, l’avion ? La navette vers le boulot en métro ou en tram ? Les boissons pétillantes ? Les édulcorants ? La clim’, le chauffage ? Naturels ? C’est une blague, n’est-ce pas?
Nombre de primates mâles violent leurs femelles ; c’est naturel. Nous sommes des primates, et malgré les lois, les actions éducatives, la répression, on viole encore environ 200 femmes par jour en France selon des statistiques récentes. Aucun doute, la nature de l’homme inclut le viol. Faut-il comprendre que, selon les naturalistes carnivores, pour respecter notre “naturalité”, il faudrait le dépénaliser ?
Malheureusement, l’argumentation des (prétendus) animalistes-végans pour laisser le chat chasser et le nourrir de cadavre… est la même ! C’est la nature du chat de manger de la viande.
Au moins, cette fois-ci, c’est vrai ; mais comme plus haut, c’est dégager UN aspect qui nous arrange de la nature et ignorer tout le reste. Est-il naturel pour un chat de se faire servir par un humain? Est-il naturel d’avoir une couche, une couverture, un chauffage quand il fait froid ? Est-il naturel d’avoir des vaccins, des médicaments voire des opérations chirurgicales si nécessaire ? Est-il naturel d’avoir une telle densité de chats ?
L’argument de la naturalité d’un choix dans notre monde moderne, où tout est artificiel, est rarement utile, et carrément irrecevable dans les exemples de notre article.
Y A-T-IL DES SOLUTIONS?
Le pire dans tout ça, c’est que naturalistes comme animalistes argumentent de façon incohérente dans le seul but de ne pas changer leurs mauvaises habitudes alors que des solutions existent et ne posent aucun problème ou difficulté majeure.
Pour les naturalistes, en devenant végans et en encourageant le véganisme partout, à tous les niveaux, non seulement ils auraient un impact positif sur les habitats naturels, sur le problème des changements climatiques, sur les zones mortes dans l’océan, sur la diminution des poissons, sur le gaspillage d’énergie, mais en plus, ils rendraient service à leur santé et pourraient donc agir mieux et plus longtemps! Voir ici notre article qui explique le lien entre la sauvegarde de la biodiversité et la santé.
Nourrir le chat (et bien évidemment le chien) sans protéines animales est réalisé quotidiennement par des milliers de francophones que vous pouvez interroger ici; les vétérinaires qui soutiennent ce choix sont de plus en plus nombreux aux États-Unis. L’évolution est en marche car il n’y a AUCUNE RAISON DE TUER DES ANIMAUX POUR NOURRIR UNE POPULATION ÉNORME DE CHATS ET CHIENS QUE NOUS AVONS CRÉÉE ARTIFICIELLEMENT. Ne fermons pas les yeux comme le font les mangeurs de viande qui seraient incapables de trancher le cou d’un poulet ou d’une vache. Aucun prétendu végan ne tuerait un poulet, un poisson ou un lapin qui vit chez lui pour nourrir son chat. Si le chat en avait vraiment besoin pour survivre, on aurait le dilemme entre tuer des lapins, des poulets et des poissons pour faire vivre UN chat ou… tuer UN chat pour permettre aux nombreux lapins, poulets et poissons de vivre ; en toute logique, la personne respectueuse des animaux choisirait le plus petit nombre de victimes! Voyez ici une analyse intéressante sur ce sujet.
La bonne nouvelle est qu’il existe une SOLUTION SANS VICTIME! Tous ces animaux peuvent vivre, et le chat aussi, avec une nourriture végétale bien adaptée (disponible dans le commerce dans toute l’Europe et en Amérique du Nord). Le seul bémol pourrait être le coût plus élevé, mais ce n’est pas non plus un argument valable. Celui qui n’a pas les moyens de nourrir un chat ne devrait pas avoir de chat. Jamais un végan ne mangera de la viande à la place d’un plat végétal sous prétexte que c’est moins cher, pourquoi choisirait-il de la viande pour le chat plutôt que le végétal pour une différence éventuelle de prix?
Les amis des chats tentent aussi souvent de nier l’impact du chat sur la faune sauvage, ou tout au moins le minimiser au maximum. Les études sur la question sont pourtant unanimes : parmi toutes les activités humaines (domestiquer les chats est bien une activité humaine), le chat domestique est celle qui provoque la plus grande mortalité directe sur la faune sauvage. Le chat tue plus que les voitures, les éoliennes, les pesticides, les chasseurs (humains), les clôtures, les baies vitrées, etc. Une étude est en cours en France, et avant même les résultats définitifs, la LPO publie déjà des faits ; par exemple, un chat féral peut tuer plus de 1000 animaux par an !
Nier ces données confirmées ne changera pas la réalité, mais le fait que de nombreux prétendus végans les nient fait perdre beaucoup de crédibilité au mouvement, notamment aux yeux des naturalistes.
Le chat est source d’une mortalité directe énorme comme l’indique sans le moindre doute les études, mais en plus s’ajoute une diminution significative des populations de prédateurs sauvages, ce qui est triste en soi et très dommageable pour les écosystèmes. Contrairement au chat domestique, le prédateur sauvage, y compris le chat sauvage, ne mange que les individus disponibles selon les dynamiques de population. En clair, si les proies, par exemple les oiseaux, produisent 100% de jeunes en plus que nécessaire pour avoir une population stable, le prédateur ne capturera que parmi les 100% de “surplus”. Si les chats domestiques tuent 90% de ce surplus (et c’est parfois bien plus), il ne reste que 10% pour les prédateurs sauvages qui voient alors leurs populations s’effondrer.
Bien sûr, il est plus “amusant” pour le chat d’être libre et pouvoir chasser. Mais les végans, champions du respect individuel et de la non discrimination, ne peuvent pas sincèrement mettre sur un plan d’égalité le confort de vie d’UN chat avec LA VIE de DIZAINES d’animaux, voire plus. Il faut à tout prix empêcher le chat de chasser, la meilleure solution étant de généralement de le garder dans la maison ou de clôturer de façon appropriée le (ou une partie) du jardin.
CONCLUSION
Pour sauver une part significative et la biodiversité et en finir avec le génocide animal en cours, il est essentiel d’aborder ces différents problèmes de façon holistique. En ayant une vision globale et objective, chacun pourrait alors percevoir les convergences de lutte entre animalistes, naturalistes et d’autres (médecins holistiques, anti-racistes, etc).
Dans l’exemple du chat, fil conducteur de cet article, il existe un compromis possible qui respecte les humains, les animaux et la nature. Les chats qui déciment les populations animales dans les milieux sensibles seraient capturés vivants au lieu d’être tirés ou empoisonnés, comme actuellement. Ils seraient adoptés par des végans qui en prendraient soin avec amour, et leur donneraient une excellente nourriture végétale adaptée, tout en les gardant bien au chaud à la maison, protégeant ainsi la faune sauvage. La stérilisation serait systématique (elle est déjà remboursée par les autorités dans certains pays comme la Colombie qui ont compris le danger des chats dans la nature, elle est obligatoire dans d’autres régions, notamment certains “Landers” allemands).
En travaillant ainsi main dans la main, les forces conjointes animalistes et naturalistes pourraient influencer de façon bien plus importante l’évolution des mentalités et aussi des législations, en devenant une force politique significative… la seule qui serait cohérente!
Discutez de ce sujet avec nous sur le groupe Éconaturalistes.
Valéry Schollaert – rédigé en janvier 2018, mis à jour en décembre 2019
Plusieurs articles sur ce blog vous permettent de comprendre la vision holistique de la conservation de la nature que nous tentons de communiquer à tous. Voici LA PAGE D’INTRODUCTION À LA VISION HOLISTIQUE où vous trouverez aussi les liens vers les autres articles.