Buse variable – Buteo buteo

Espèce complexe à reclasser – publiée le 27 novembre 2018
Publication complète – Famille des Accipitridae (buses, aigles, éperviers, etc.)
En anglais: Common Buzzard in English

Buteo_buteo_main

Ce rapace, souvent le plus fréquent des Accipitridae en Eurasie, est bien connu des naturalistes et même du grand public. On s’attendrait à une connaissance détaillée de l’espèce dans tous ces aspects mais on est loin du compte. La variations régionales n’ont d’égale que la variabilité du plumage, rendant toute classification assez approximative, surtout que les buses ont évolué très récemment depuis un ancêtre américain qui a colonisé l’Eurasie et l’Afrique. Un cas à étudier en profondeur par des chercheurs qui n’ont pas peur des défis inextricables…

Buteo_buteo_11fr

En Europe occidentale, cet oiseau est bien observé et les détails de son mode de vie sont bien étudiés dont voici un petit résumé (valable pour Buteo buteo buteo). Le nid est souvent construit, et bien caché, dans la couronne d’un grand arbre ; le couple en a souvent plusieurs et change de nid d’une année à l’autre pour y revenir plus tard. Les 2, 3 ou rarement 4 œufs sont couvés surtout par la femelle durant environ 5 semaines. Le mâle nourrit les jeunes durant les 3 premières semaines puis la femelle s’y met aussi. Il faut près de deux mois avant l’envol des jeunes qui seront alors encore nourri deux mois de plus avant d’atteindre l’indépendance. Ces oiseaux sont habituellement adultes en trois ans mais exceptionnellement peuvent nicher après un an.

Buteo_buteo_9fr

La Buse variable chasse principalement les mammifères au sol. Les campagnols constituent les proies favorites, mais d’autres petits rongeurs sont consommés aussi notamment les rats. Selon les disponibilités, d’autres proies font partie du régime, par exemple les lapins, en particulier dans les régions où il n’y a pas de campagnols. Oiseaux (dont des Corvidae), parfois pris au nid, reptiles, amphibiens et même des anguilles sont chassés, et des invertébrés sont ingérés également. En période hivernale, elle ne dédaigne pas une charogne.

La migration est très complexe et dépend des populations. Les populations meridionales et îliennes sont souvent sédentaires, les buses nordiques sont migratrices mais on distingue nettement les Buteo buteo  qui hivernent en Europe et sur le pourtour méditerranéen des Buteo buteo vulpinus qui hivernent en Afrique noire ou en Asie méridionale. Cette différence nette semble en faveur de de la distinction en deux espèces. Cependant, que font les nombreux intermédiaires ? Une partie de la réponse se trouve au Moyen-Orient. Chaque année, des observateurs de la péninsule arabique font des demandes d’identification hivernales concernant des buses potentiellement “variables” car la “Buse des steppes” est sensée hiverner bien plus au sud. Souvent, aucune identification sub-spécifique n’est obtenues : en effet, ces oiseaux présentent un phénotype intermédiaire…

Taxonomie et sous-espèces

Le genre Buteo vient d’Amérique et s’est étendu rapidement en Eurasie et en Afrique. Les relations entre tous les taxons sont donc étroites et il est très difficile de déterminer les limites des différentes populations.  À la limite, on pourrait imaginer regrouper presque toutes les buses d’Eurasie et d’Afrique en une seule espèce, mais cela occulterait le statut particulier de certaines populations endémiques qui méritent certainement notre attention. Voici notre résumé de la situation :

A. Espèces reconnues par certains auteurs qui auront leur fiche sur notre site

  • Buse du Japon Buteo (buteo) japonicus : espèce reconnue par HBW Alive sur base de différences vocales et génétiques mais virtuellement indiscernable de certaines Buses variables. Il y est cependant précisé que c’est un classement “intérimaire” en attendant  d’autres études.
  • Buse de l’Himalaya Buteo (buteo) refectus : la confusion est amplifiée par l’existence de deux noms scientifique (Buteo refectus et Buteo burmanicus) et par l’inclusion tantôt à la Buse variable, tantôt à la Buse du Japon voire à la “Buse des steppes” (vulpinus, voir plus bas). Il semble que cette population restreinte à l’Himalaya et principalement sédentaire soit relativement distincte génétiquement.
  • Buse de Madagascacar Buteo (buteo) brachypterus : cette population géographiquement isolée mérite sans doute un statut d’espèce endémique malgré est apparente proximité avec la Buse variable ainsi qu’avec les deux taxons suivants.
  • Buse montagnarde Buteo (buteo) oreophilus : cette espèce des hauteurs d’Afrique orientale est désormais acceptée par tous les auteurs comme espèce distincte malgré une divergence génétique avec la Buse variable “difficile à établir”. Voir sa fiche.
  • Buse forestière Buteo (buteo) trizonatus : anciennement considérée comme sous-espèce de la Buse des montagnes, cet endémique sud-africain a récemment été observé se reproduisant avec des Buses variables “des steppes” (B. b. vulpinus) en Afrique du Sud où cette dernière hiverne communément. Cela prouve encore, s’il le fallait, la proximité génétique de tous ces oiseaux et la difficulté de les classer.
  • Buse du Cap Vert Buteo (buteo) bannermani : bizarrement, alors que la divergence génétique de ce taxon avec Buteo buteo semble un peu plus nette qu’entre cette dernière et les autres taxons africains, la majorité des auteurs conservent la Buse du Cap Vert en sous-espèce de la variable. Cela semble dommage car ce taxon est en danger critique d’extinction et devrait attirer toute notre attention.
  • Buse de Socotra Buteo (buteo) socotraensis : cet endémique de Socotra a été observé depuis plus d’un siècle mais n’a été officiellement décrite qu’en 2010. Elle est proche génétiquement de la Buse du Cap Vert !
Buteo_buteo_12fr

B. La “Buse des steppes”

Les buses de Russie, grandes migratrices vers l’Afrique et le sud de l’Asie, ainsi qu’une population apparemment sédentaire d’Asie mineure sont parfois considérées comme formant, ensemble, une espèce distincte, la Buse des steppes (Buteo vulpinus). Il y a toutefois une hybridation importante et de nombreux individus intermédiaires entre vulpinus et buteo en Europe de l’est et en Scandinavie. D’autres auteurs estiment que le flux génétique est tel que vulpinus n’est même pas une sous-espèce valide de buteo. Au vu de la difficulté, voire de l’impossibilité de distinguer les deux taxons sur le terrain, il semble préférable de ne pas en faire des espèces distinctes.

C. La “Buse du Maghreb”

Le taxon nord africain “cirtensis” était habituellement considéré comme une sous-espèce de la Buse féroce (Buteo rufinus). Si leur plumage est semblable (et également ressemblant aux “Buses de steppes” typiques), la forme de cirtensis ainsi que sa voix rappellent plus la Buse variable que la Buse féroce. Depuis peu, elle a été observée s’hybridant avec Buteo buteo dans le sud de l’Espagne et cette hybridation semble au moins partiellement fertile ; cette population est parfois appelée “Buse de Gibraltar”. Cela implique que la Buse du Maghreb est une sous-espèce de la Buse variable, ou alors une espèce distincte proche, à l’instar de la Buse forestière ou d’autres, mais pas une sous-espèce de la Buse féroce. Cette affirmation que nous avons publiée ici en novembre 2018 est désormais confirmée par une étude scientifique.

D. Les autres taxons insulaires

Buteo_buteo_3fr

La plupart des sous-espèces reconnues ou supposées posent également des problèmes aux taxonomistes. Les oiseaux de Corse et de Sardaigne (B. b. arrigonii) sont parfois regroupés avec ceux d’Italie et de Sicile (B. b. pojana). La population de Madère, souvent appelée B. b. harterti,  n’est pas admise comme sous-espèce distincte par tous. Les oiseaux des Açores, eux appelés B. b. rothschildi, sont parfois regroupés avec B. b. insularum des Canaries. Ce taxon là aussi est problématique : à l’ouest comme à La Palma, il y a effectivement des phénotypes qui rappellent ceux des Açores. Toutefois, à l’est, notamment Lanzarote et Fuerteventura, les plumages se rapprochent plus… de la Buse du Maghreb (voir ci-dessus) ! Il y a d’ailleurs des observations de Buse du Maghreb dans ces îles, et il n’est pas impossible que la similitude des plumages soit liée à une hybridation récente, à l’instar de celle observée entre cirtensis et buteo dans le sud de l’Espagne.

Les futures études détaillées sur les buses réserveront sans aucun doute des surprises !

Buteo_buteo_6fr
Buteo_buteo_4fr
Buteo_buteo_10fr
Buteo_buteo_2fr
Buteo_buteo_8fr

[Espèce Nº331 du projet d’encyclopédie holistique]

spprevious
spsuivante
sommaire

Photos et textes © Valéry Schollaert 2018 – 2020

Liste des autres espèces illustrées : taxonomiquejour par jour

Untitled 2

7 thoughts on “Buse variable – Buteo buteo

  1. Souvent observée près de chez moi posée. En promenade, en vol. Souvent posée sur les piquets le long des autoroutes. Le plumage peut-être clair ou foncé comme décrit dans les commentaires.

    Liked by 1 person

Leave a comment